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Friday, July 20, 2012

Offensive tous azimuts des atlantistes : le cas de René Balme

11 septembre, armes de destruction massive, crise économique, Tarnac, Libye, Syrie. Cela fait un moment que la presse française se goure à peu près sur tout. Mais s'agit-il vraiment d'idiotie ?

Devant la crise européenne des dettes publiques, ce qui surprend le plus l'esprit éclairé c'est la propension des élites à aller droit dans le mur. L'austérité pour combattre le déficit des budgets étatiques est de fait la pire solution qui soit, ou plutôt la pire option économique qui soit étant donné l'impropriété lexicale du mot "solution" dans le cas présent. Le principe du cercle vicieux faisant que l'attrition des dépenses publiques conduit nécessairement à une perte de recettes fiscales et donc à un endettement de l'état plus important n'est pas seulement une évidence pour tout économiste digne de ce nom, il a surtout été démontré sur le terrain à peu près cent mille fois. Qu'est-ce qui alors empêche les dirigeants les plus en vue de l'Europe de comprendre une telle évidence et d'adopter par rapport à elle les politiques de relance qui s'imposent ?

On donne généralement à cette question deux réponses. Les élites au pouvoir, autant de gouvernement que médiatiques, n'ont pas les moyens de comprendre l'évidence d'un tel cercle vicieux, gorgés qu'ils ont été - dans les "grandes écoles" qui les ont formés - des théories néo-libérales les plus ineptes. En somme, l'horizon intellectuel qui leur a été inculqué, et qui leur a permis d'atteindre la position sociale qui est la leur, ne peut simplement pas être dépassé. C'est parce qu'ils ont soutenu avec conviction les thèses ridicules de Hayek et consorts durant tout leur parcours politique ou professionnel qu'ils en sont arrivés là où ils sont (cf. les "grands" éditorialistes français ou les principales figures actuelles du PS - sans parler évidemment de l'UMP). Il est somme toute assez légitime pour eux de se conformer aux données intellectuelles qu'on leur a inculquées, puisque c'est à elles qu'ils doivent leur place. Peu importe que celles-ci soient des inepties tant qu'on leur reconnait encore une autorité suffisante. Et de fait, la crise des quatre dernières années - en soi une dénonciation complète des orientations préconisées par les ultra-libéraux - n'a absolument pas diminué l'influence des héritiers de Hayek. En Allemagne, en Angletterre, en Espagne (en France ? le point d'interrogation est probablement de trop), les thuriféraires de l'école de Chicago ont connu le succès électoral, alors qu'on installait en Italie ou en Grèce des semi-déments du même tonneau. Et l'on n'a pas vu, que l'on sache, de profonds bouleversements au sein du monde médiatique, particulièrement français. Ce n'est pas faute pourtant pour celui-ci de professer systématiquement les pires âneries.

Une seconde manière d'approcher la question de la faillite intellectuelle de nos élites est de considérer que celle-ci n'est pas seulement fortuite mais qu'elle participe d'un plan concerté. Que François Hollande, Pierre Moscovici, Marisol Touraine, Aquilino Morelle, Arnaud Montebourg et Najat Vallaud-Belkacem aient tous été des Young Leaders de la French American Foundation et soient aujourd'hui à la tête du gouvernement français, cela donne un poids indéniable à l'approche. Au moins cela laisse songeur. Le problème d'une telle approche ne manquera cependant pas de vite apparaître. Elle rend son porteur très vulnérable à l'accusation "décisive" et parfois définitive de (tremblez dans les chaumières) "conspirationniste".

Pour n'avoir aucune valeur intellectuelle (que dénonce vraiment ceux qui l'utilisent ?), l'accusation de "complotiste" est une grande mode journalistique et politique depuis pas mal de temps. Elle est généralement accompagnée de la certitude que la destruction de trois tours un certain 11 septembre par une petite bande de terroristes à cutter dirigée par un milliardaire réfugié dans des grottes high-tech qui n'existent pas au fin fond de l'Afghanistan ne constitue d'aucune manière, elle, une thèse complotiste. Ceux qui prétendent le contraire sont (outre des "complotistes" donc) des négationnistes qui nient la valeur historique insurpassable de la Commission d'enquête américaine convoquée par le président Bush (connu pour sa probité dans "l'affaire" des ADM) ; commission qui publia le 22 juillet 2004 un rapport "définitif" sur les événements du 11 septembre, quoique les rédacteurs dudit rapporteur aient eu l'indécence de déclarer deux ans plus tard que la commission qu'ils présidaient n'avait été mise en place que pour "échouer". Dénoncer un rapport aussi probant d'un point de vue historique, cela s'appelle du négationnisme en France.

Alors ? Faut-il considérer nos élites comme de simples ahuris passés à la moulinette de SciencesPo ou de Harvard, ou bien des traîtres en puissance ? La propension de la Commission Européenne, dont les membres sont tous passés par les plus grandes écoles, à nous amener tous dans le mur, est-ce le fruit d'une éducation de décérébration permanente de longue haleine n'ayant perdu au moment d'être appliquée aucun de ses pouvoirs de nuisance, ou bien a-t-on affaire à quelques individus parfaitement conscients des conséquences des politiques qu'ils préconisent ou qu'ils appliquent (paranoïa feinte concernant les dettes publiques, offrant l'opportunité de démolir les avancées sociales obtenues au cours du 20ème siècle par les "gueux") ?

Entre deux explications, pourquoi choisir forcément ? L'affaire René Balme offre en tout cas un éclairage intéressant sur la question. Suspecté d'abriter les thèses "conspirationnistes" de Thierry - brrrr - Meyssan sur son site Oulala, René Balme (candidat pour le Front de Gauche aux dernières législatives) a finalement choisi de quitter le Parti de Gauche après lesdites élections. Prenant acte du fait, le Parti de Gauche crut bon de déclarer, en guise d'explication et avec le courage qu'il faut pour tenir de tels propos aujourd'hui en France, "que nous ne partageons en rien les théories « complotistes » d’individus comme Thierry Meyssan. Et même, nous les condamnons." Ceci expliquant cela, c'est-à-dire le peu de conviction que l'on eut pour défendre René Balme durant cette fameuse affaire.

Mais le plus intéressant n'est pas tant la pusillanimité des dirigeants du PG, qui ne font que céder à l'omerta générale de rigeur en France lorsque sont évoqués les événements du 11 septembre (qui équivalent à peu près aujourd'hui à la crucifixion du Christ, par rapport à laquelle il convient seulement de dire "amen"). Le plus intéressant c'est de relever d'où l'attaque est venu, et nous n'avons pas affaire là à une inconnue. Ornella Guyet s'est déjà distinguée pour sa charge, autant inepte que bruyante, contre le site Le Grand Soir. Lequel a le malheur de ne pas avoir exactement les mêmes idées que le président des USA concernant (au choix) l'Irak, l'Iran, la Libye, Israël, la Palestine, Chavez, Castro, la Syrie (à peu près tout en somme). Idées qu'il convient de qualifier, selon la terminologie remarquable de rigueur d'Ornella Guyet, de "rouges-brunes".

En soi, rien d'extraordinaire finalement. Encore une atlantiste de plus, complètement illuminée mais a priori pas encore trop méchante. Il ne faudrait cependant pas mésestimer l'adversaire. Et ne pas avoir trop de doutes quant aux maîtres-chiens qui nous l'envoient. L'intrusion des services secrets étasuniens dans les milieux progressistes des pays jugés trop indépendants n'est pas une nouveauté, pour ceux qui ont lu le livre Les Guerres scélérates de William Blum (cf. notamment le chapitre 16 "La CIA et ses syndicats mafieux" ; lire aussi les Armées secrètes de l'OTAN de Danièle Ganser). Qu'on soit sûr que la France n'échappe pas aujourd'hui à une telle infiltration et que le Front de Gauche, pour ce qu'il a pu représenter durant les dernières élections, soit surveillé de très près.

De l'aveuglement des dirigeants du PG jusqu'au travail de sape réalisé par une Ornella Guyet un temps infiltrée au sein d'Acrimed, ce ne sont là que les deux faces d'un effort de propagande qui part de loin et qui se donne tous les moyens pour parvenir à ses fins. D'une part, maîtriser le champ d'intellection dans les limites duquel ceux qui visent le pouvoir auront le droit de s'exprimer (enseignement de Hayek à SciencesPo et à L'ENA). D'autre part, poster quelques cerbères aux points les plus névralgiques (les grands médias mais aussi les médias dits "contestataires") dont les aboiements ("complotiste", "négationniste", antisémite", "ouaf") suffiront en principe, sinon à ramener les brebis égarées au sein du troupeau, du moins à les garder loin du troupeau si celles-ci ne font pas amende honorable.

Reste évidemment à définir ceux qu'un tel effort de propagande intéresse. Un premier indice ici.

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Tabou médiatique sur la séparation des banques par activités, pourquoi et comment ?

Au pays des ratios bancaires fonds propres/actifs les plus exécrables au monde, il était normal que la séparation des banques par activité y soit tabou. Voulu à l'image de la City, les too big to fail français ont façonné la culture hexagonale comme celle anglosaxonne : Lord Keynes dans son acceptation de la banque (de risque) universel(le) et son relativisme convenu sur les souverainetés nationales vaut mieux que Roosevelt pour recadrer tout possible projet de régulation bancaire. Qu'on se le dise les gueux !

Mais les choses changent chez les anglosaxons. Le scandale du Libor montre que les banques universelles n'ont pas hésité, encore une fois, à pénaliser leur propre client à grande échelle ! Où est le contrepoids ? Comment responsabiliser et donc menacer de jugement voire de faillite les banques ? Même les anglosaxons les plus obtus en la matière ont reconnu leur erreur de s'être opposé à la séparation des banques par activité. En France, rien. C'est la même chose en Belgique et c'est historiquement bien plus étonnant. Dois-je rappeler que la Belgique fût le premier pays à adopter la régulation bancaire de Roosevelt dès 1934 (11 ans avant le reste de l'Europe) grâce à Albert 1° ? Oui puisqu'à l'évidence les régulations bancaires fortes sont maintenant mieux ignorées sur le continent européen que chez les anglosaxons !

Essayez seulement de parlez chez nous des faits d'armes de Roosevelt (évite de justesse des tentatives d’assassinats, redonne espoir aux USA avec son programme du New Deal, crée les 100 jours pour juger où il va séparer les banques, évite la famine aux USA, dote les USA de réserves d'or qui lui manquait cruellement par le passé, juge Prescott Bush pour trahison, juge Morgan pour pots de vin généralisés, évite une tentative de coup d'état autoritariste sur le modèle européens en 1935,... bref sauve les USA de l'autoritarisme dans lequel sombrait l'Europe). Cheminade le prouve, vous passerez au mieux pour un iconoclaste et au pire pour un dangereux sbire des américains (alors que Roosevelt était pour le multilatéralisme et a abandonné la doctrine Monroe !!!) ou un antisémite (alors que c'était le congrès US par antibolchévisme, pour ne pas dire pronazisme, qui s'opposa à l’accueil du St Louis) voire un keynésien (alors que Roosevelt n'était ni impérialiste, ni malthusien, ni eugéniste contrairement à lui), un choix laissé gracieusement par la culture financière des too big to fail dont ne se prive que trop peu de personne. Les plus insensibles se contentant du fataliste « c'est trop tard de toute façon », voilà comment il est intellectuellement interdit de penser séparation des banque par activités chez nous.

Bien sûr des personnes s’élèvent contre cet interdit chez nous. Cheminade étant le seule à défendre médiatiquement le retour à la séparation des banques par activité (mal lui en prit) depuis 30 ans, il continue évidement de plus belle. Reste des personnes lucide comme Oliver Delamarche ou Alpha Value dans le domaine financier, Trends-Tendances au niveau de la presse et Eric de Keuleneer pour illustrer les professeurs. Mais aucun média généraliste, ni en Belgique, ni en France, ne parle de ce sujet et ce n'est pas la conscience populaire bien formatée qui va faire pression apparemment.

Alors rassurez-vous les gueux, des gens seront là pour banaliser le scandale du Libor ou d'autres iront prôner encore moins de régulation puisque c'est les banquiers centraux les grands méchants du Libor et qu'un too big to fail peut se responsabiliser seul en coulant sans conséquences pour le reste de l'économie. Puisqu'on te le dit.

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Un enseignement pour singes savants

Une page du site Eduscol [2] propose des ressources pour la mise en œuvre du nouveau programme de mathématiques du lycée et son application à la terminale dès la rentrée 2012. Ces ressources sont trop ambitieuses pour l'horaire dont on dispose et la réalité de l'enseignement des mathématiques.

Bien qu’intéressantes du point de vue culturel, ces activités donnent le tournis. On y voit beaucoup de calculs, de listes de nombres, de copies d'écrans d’ordinateurs, et finalement tout un maelstr?m qui met systématiquement l’accent sur le traitement brut de l'information numérique, l’exploitation de la puissance de calcul des machines, les statistiques, les TICE et l'expérimentation. C’est la mode actuelle et personne n’y coupe. Il s’agit encore et toujours de « placer l’élève au centre du savoir » et de l’amener à « construire lui-même ses connaissances », d’où une profusion d’activités qui engluent celles-ci dans une pâte informe et rendent finalement plus difficile l’apprentissage des savoirs scientifiques.

Bien évidemment, les buts affichés sont vertueux et personne n’osera critiquer le fait qu’il s’agit de « former l’élève à la pratique d’une démarche scientifique » et « mettre en œuvre une recherche de façon autonome ». Les compétences mises en jeu sont aussi louables et rentrent tout à fait dans le cadre de l’enseignement des mathématiques. Il s’agit de :

- Savoir mener des raisonnements,

- Adopter une attitude critique vis-à-vis des résultats obtenus,

- Apprendre à communiquer à l’écrit et à l’oral.

Le problème est ailleurs : il réside dans les méthodes adoptées et leur adéquation avec les volumes horaires autorisés dans les sections dites « scientifiques » qui, réforme après réforme, tendent à devenir beaucoup plus généralistes que scientifiques.

Dans l’idéologie dominante, le professeur doit s’effacer suffisamment pour se transformer en une ressource au secours des apprenants, sans jamais offrir un discours structuré sur les connaissances qu’il est censé enseigner. Le cours magistral a disparu depuis belle lurette du secondaire, mais on continue à vitupérer contre. Un anathème est lancé si un enseignant ose commencer un cours par autre chose que plusieurs activités d’introduction quand bien même celles-ci ne seraient pas nécessaires, et l’on recommande d’utiliser un vidéoprojecteur ou des travaux sur ordinateur pour projeter des images ou explorer des situations avant de commencer.

Tout cela a un prix : il existe des écueils qui inquiètent beaucoup les collègues du secondaire avec qui j’ai eu l’occasion de parler. Ceux-ci ne prennent pas le risque de dire tout haut ce qu’ils vivent sur le terrain, et s’autocensurent fréquemment car des sanctions peuvent toujours s’abattre sur celui ou celle qui serait un peu trop critique vis-à-vis des orientations prises dans l’enseignement des mathématiques. S’il doit tout faire pour développer l’esprit critique chez ses élèves, un « bon enseignant », tel un « bon petit soldat », doit savoir ne pas trop en abuser quand il s’agit d’instructions officielles qu’il est tenu d’appliquer, au risque de se retrouver mal noté, avec un emploi du temps à trous et des classes difficiles.

Le problème est pourtant sérieux car il engage pour des décennies. Pour atteindre les objectifs annoncés, la mode est de sans cesse recourir à l’expérimentation sur machine, à l’algorithmique et à la libre autonomie des apprentissages. Avec de tels choix, les écueils les plus importants sont le manque de temps et le manque de matériel, et le dégât collatéral le plus dangereux est la mise en adéquation du programme d’une discipline avec les impératifs numériques annoncés.

Le temps d’enseignement « en présentiel » est insuffisant pour que l’on puisse envisager autant de travaux pratiques sur ordinateur, à moins de supprimer l’acquisition de connaissances fondamentales. C’est ce que l’on a choisi de faire, sans état d’âme. Avec la réforme 2010, un élève de première « scientifique » se contente de quatre heures de mathématiques par semaine au lieu de six les années précédentes, sur un programme édulcoré, en adoptant une progression spiralée qui interdit au professeur d’aborder une notion et d’achever son étude en un temps raisonnable. La mode est à l’effleurage des notions sur lesquelles on est tenu de revenir ensuite régulièrement mais longtemps de façon imparfaite, et à l’étude de plusieurs notions en parallèle. Cette méthode ne permet pas à l’élève de se construire des repères fiables sur des questions simples qui posaient peu de problèmes dans le passé. Interrogés, les élèves préfèrent des cours progressifs et structurés qui exposent clairement les savoirs et qui vont droit au but.

Quant au matériel, il ne suit pas, et ne suivra sans doute jamais compte tenu du niveau irréaliste d’investissement que cela demande à la société pour atteindre des résultats extrêmement modestes. De plus, il ne faut pas oublier que le nombre d’élèves par classe influe directement sur l’efficacité des travaux pratiques, et que des classes à 37 élèves, comme cela se voit souvent, rendent illusoire tout bénéfice lié à une quelconque expérimentation en salle informatique où attendent seulement une quinzaine d’ordinateurs en état de marche.

Dans un cadre horaire insuffisant, l’irruption des travaux pratiques sur ordinateurs et d’activités longues de travail autonome apparaît comme une gesticulation pédagogique destinée à faire croire que l’on réalise de grands desseins. La réalité est que l’on se trouve dans l’incapacité de raisonner à partir de définitions rigoureuses pour démontrer des résultats fondamentaux parce que l’on n’a plus le temps de travailler les bases.

Voici un exemple. Avant les années 1980, un élève de terminale savait démontrer que la limite d’une fonction en un point était unique, si elle existait. Il pouvait démontrer que la fonction sinus n’admettait pas de limite quand x tendait vers l’infini. En cours, on lui démontrait les théorèmes généraux sur les limites, et il pouvait aborder la notion de dérivabilité des fonctions avec confiance et sérénité. Il possédait un avantage considérable sur l’élève d’aujourd’hui auquel on est tenu de ne donner qu’une définition vaseuse de la limite d’une fonction, et qui se voit incapable de démontrer quoi que ce soit dès qu’il s’agit de limites, à moins d’admettre une kyrielle de résultats, ce qui, en mathématiques, est parfaitement débilitant.

Je parle ici uniquement des programmes des sections scientifiques qui sont construits a priori pour des élèves qui se destinent aux métiers scientifiques. Je rappelle aussi que les mathématiques ne font plus partie de l’enseignement obligatoire proposé en section littéraire, ce qui place cette filière hors de notre propos.

Que dire des élèves qui veulent faire des mathématiques ? Où iront-ils ? Faut-il rappeler qu’en mathématiques, ne pas disposer d’une définition rigoureuse signifie que l’on est incapable de démontrer quoi que ce soit où intervient ensuite l’objet de cette « définition » ? En réduisant les mathématiques à des séries d’observations éparses qui ne donnent pas lieu à l’établissement et à l’exploitation de définitions rigoureuses et de théorèmes démontrés avec soin, on détruit tout ce qui fait la spécificité de cette science, on la gomme, et l’on empêche les élèves qui en ont les moyens de s’abreuver à cette source spécifique de connaissances. Bref, on fait de tout, sauf des mathématiques !

De l’ambition, il y en a trop dans les nouveaux programmes de mathématiques en section S du lycée ! Mais il a surtout l’ambition de montrer que l'on fait de grandes choses sans en avoir les moyens. On brasse des idées floues sans prendre la peine de donner des définitions précises, parce qu’on n’a pas les moyens de les comprendre. En mathématiques, ne pas avoir de définition précise revient à s’interdire de démontrer correctement quoi que ce soit. En ce début du vingt et unième siècle, on arriverait donc à faire des mathématiques sans faire de démonstrations et en admettant tous les résultats importants !

Cette approche « à la mode », imposée aux professeurs, est devenue tellement systématique qu’elle va jusqu’à déterminer le choix du contenu scientifique à enseigner. Certaines notions fondamentales, comme les barycentres, les similitudes ou le produit vectoriel, disparaissent complètement de l’enseignement dans les séries scientifiques pour laisser la place au traitement statistique des données, à l’échantillonnage, à l’estimation par intervalles de confiance et aux tests d’hypothèse. A croire que les mathématiques ne servent plus qu’à former des sociologues ou des analystes financiers. 

L’étude d’équations différentielles linéaires à coefficients constants du premier ou du second ordre, qui figurait au programme de terminale scientifique depuis des lustres, et permettait d’envisager des applications fondamentales en physique pour l’étude des phénomènes vibratoires ou de la radioactivité, a disparu du programme. A l’époque où l’on répète comme un gargarisme que le salut ne sera obtenu qu’en travaillant toujours plus l’interdisciplinarité, cette « interdisciplinarité » devient lettre morte lorsqu’il s’agit de sciences aussi voisines que les mathématiques et les sciences physiques ! Il y a de quoi rire jaune…

Les programmes de terminale S continuent cependant d’introduire l’exponentielle comme la solution d’une équation différentielle, dans l’unique but de pouvoir aborder l’étude de cette fonction en utilisant une activité sur ordinateur : il est ainsi conseillé d’utiliser un tableur pour obtenir la construction approchée de la courbe de la fonction y qui vérifie y’=y et y(0)=1 grâce à la méthode d’Euler. Une très belle activité, dévoreuse en temps, qui ne permet pas d’articuler l’étude de l’exponentielle de la façon la plus simple possible, et qui laissera aux élèves un drôle d’arrière-goût : celui que cette fonction bizarre est difficile à étudier et d’approche difficile. Ne pas chercher le discours le plus direct et le plus simple pour apprendre les mathématiques n’est pas une bonne solution quand on connaît la baisse des horaires d’enseignement dans cette discipline et la difficulté dans laquelle les élèves se trouveront plus tard à l’université pour « construire leur savoir » à partir des découvertes éparses qu’ils auront accumulées au grès des activités sur machines dont on les aura abreuvés.

Des scientifiques éminents, membres de l’Académie des sciences, avaient pourtant prévenu le ministère bien à l’avance de la dangerosité des choix effectués dans ces nouveaux programmes de mathématiques. Cela n’a servi à rien, et nous retiendrons que les décideurs ne sont pas à chercher parmi les scientifiques, et que la nation ne tient pas compte des avertissements de ses experts, ce qui est très inquiétant. Voici en quels mots ces experts parlaient du programme de terminale destiné à nos jeunes scientifiques :

« En ce qui concerne les programmes de mathématiques de terminale S, un examen détaillé des textes proposés révèle de graves insuffisances et incohérences. Les ambitions affichées dans le préambule (capacité à effectuer des recherches autonomes, à avoir une attitude critique, à modéliser) ne seront en aucun cas réalisables compte tenu des horaires assignés et des contenus proposés. On observe en plusieurs endroits l'abandon des définitions utiles et du formalisme minimal qui seuls pourraient permettre de conduire des raisonnements précis et argumentés. Ainsi en analyse, alors que la définition des dérivées est supposée déjà avoir été travaillée en classe de première, la notion de limite finie en un point n'est plus au programme, et toute mention de la relation avec la continuité a disparu. 

Beaucoup de définitions en appellent à de vagues intuitions et la plupart des résultats fondamentaux sont admis. Au lieu de recommander l'affermissement des capacités calculatoires des élèves, l'ambition affichée pour le calcul des dérivées se réduit à l'emploi d'une prothèse, à savoir l'usage de logiciels de calcul formel. La fonction tangente semble quant à elle avoir disparu des exigences. Au titre des graves incohérences, on constate la disparition du chapitre sur les équations différentielles, tandis que la fonction exponentielle continue à être introduite comme la solution d'une telle équation. Le chapitre sur les probabilités, qui ne paraît imposant que superficiellement, se voit privé de beaucoup des fondements nécessaires à son traitement et à sa compréhension : il vaudrait bien mieux en la circonstance cadrer davantage le contenu afin de pouvoir étudier la question en profondeur. La géométrie est hélas de nouveau le parent pauvre de ce projet de réforme ; ainsi, l'introduction des nombres complexes est amputée du support géométrique que constitue l'étude des similitudes, et le contenu de géométrie dans l'espace manque cruellement d'une vision d'ensemble. 

Le programme de l'enseignement de spécialité ne vient guère corriger ce tableau général médiocre puisqu'à côté des notions de décomposition en produit de facteurs nombres premiers ou de pgcd qui auraient pu autrefois relever du début du collège, on voit apparaître des propositions assez surprenantes sur le « modèle de diffusion d'Ehrenfest » ou les « marches aléatoires sur les graphes » dont l'intitulé fait plutôt penser à des recherches avancées de spécialistes... » [4]

Les enseignants et les élèves sont maintenant nombreux à pâtir des élucubrations d’un programme étonnant, improvisé dans la hâte et sans doute concocté par un panel de non-scientifiques non experts en enseignement des sciences. Dans ce même communiqué, on peut d’ailleurs lire ces paroles sages :

« La conception de nouveaux programmes ne saurait s'improviser en quelques semaines, et il serait très souvent souhaitable d'effectuer des expérimentations préalables dans des classes représentatives, suivies d'une analyse impartiale a posteriori par des experts et par le milieu enseignant. » [4]

Comment réagiront les élèves ? Auront-ils envie de faire des mathématiques dans ces conditions ? Ne seront-ils pas dégoûtés dans cette obligation de traiter sur machines des centaines de tableaux de nombres à des fins statistiques au lieu de comprendre ce que représente une notion ? Au lieu de disposer de la source précise des connaissances ? Pour qui les prend-on ?

Ces choix pédagogiques représentent beaucoup de tracas et de temps gaspillé pour finalement acquérir des connaissances et des compétences floues que l’élève devra préciser, seul et livré à lui-même, dans un chaos total pendant ses premières années d’université, si seulement il consent à s’orienter dans des études scientifiques. Un tel programme découragera beaucoup de « cerveaux bien faits » car il met l’accent sur la communication et la forme, en oubliant les contenus et le sens.

L’utilisation de machines de toutes sortes peut bien sûr rendre d’énormes services en mathématiques, mais seulement si cela est envisagé sans que l’on détruise les fondements de cette science et que l’on tienne nos jeunes esprits à l’écart des connaissances brutes. La priorité donnée à l’expérimentation, et le recours systématique à celle-ci dans un cours de mathématique, pose un véritable problème dont on apercevra les effets nocifs dans quelques années.

Sans des horaires importants, donc adaptés à ces velléités pédagogiques, il est préjudiciable de faire perdre du temps aux élèves. Que restera-t-il si les fondamentaux ne sont jamais travaillés et assimilés pied à pied ? L'élève assimilera les mathématiques à des traitements fastidieux de listes de nombres et à des tracés compliqués dont on n’a que faire, et changera de voie le plus vite possible. Nous ne lui offrons pas de « belles mathématiques », mais des mathématiques tape-à-l’œil qui fatiguent celui qui s'y lance. Or les universités manquent d’étudiants scientifiques [1].

Un document d’accompagnement des programmes en analyse [3] propose toute une série d’activités sur le thème du second degré, plus exactement, il s’agit de cinq séquences sur ordinateur pour tester des hypothèses et lire des réponses proposées par des élèves fictifs qui utilisent des méthodes variées sur des calculatrices ou des logiciels comme Geogebra et Xcas. Certains passages sont effacés et doivent être complétés. Ces activités à trous sont jolies et apportent effectivement quelque chose dans le cadre d’un travail d’approfondissement réservé à des volontaires qui auraient beaucoup de temps à y consacrer. Mais ces activités monopolisent cinq heures de cours de seconde pour finalement calculer une aire de triangle en fonction de x, et écrire un polynôme du second degré sous sa forme canonique, sans arriver à dégager de formule générale dont l’apprentissage est laissée à plus tard. Pourquoi tant de fatigue alors que des connaissances plus précises et plus générales peuvent être acquises en deux heures si l’on se permet d’exposer la « mise sous forme canonique » pour traiter le cas général et regrouper les résultats obtenus dans un théorème à retenir ? Il ne restera ensuite qu’à s’entraîner sur des exercices non TICE, et croyez-moi, celui qui choisira cette voie comprendra mieux, retiendra mieux, et saura qu’il possède un brin de connaissances « sûres ».

Non, nos élèves ne méritent pas autant d’acharnement numérique, simplement parce que l’ordinateur est devenu l’alpha et l’oméga de toute chose pendant quelques décennies, jusqu’à ce que l’on ait compris qu’il s’agit d’un outil formidable et exceptionnel si on l’utilise à bon escient. Que de complications inventées seulement pour justifier l’emploi de logiciels, et pour suggérer qu’il est impossible de penser sans logiciel. Le cerveau humain ne serait-il donc plus capable d’abstraction sans l’aide d’un calculateur ? L’enfant qui aura passé 5 heures à travailler sur ces activités sur les équations du second degré aura l’impression d’avoir achevé quelque chose de très compliqué réservé à une élite intellectuelle, et retiendra peut-être seulement que la factorisation d’un polynôme du second degré est une chose excessivement difficile que l’on doit laisser aux spécialistes chevronnés.

Sur une copie fictive d’élève proposée dans l’une des activités proposées sur (Eduscol1, 2012), on lit : « le résultat est monstrueux, je n’ai pas réussi à faire mieux, ça tourne en rond mais on voit bien qu’on peut simplifier… ». Oui, tout cela est monstrueux et c’est sans doute ce qui restera dans l’esprit des élèves : qu’en classe de mathématiques, on fait des choses monstrueuses pendant des heures interminables pour accoucher d’une souris. Pour des connaissances qu’il aurait été plus facile d’introduire directement !

C’est sans doute ce qu’a voulu me dire un élève de première de Guadeloupe interrogé en juillet 2012. Je conduisais en direction de Deshaies quand j’ai pris deux autostoppeurs. C’étaient des lycéens, lui, en terminales S, venait juste de passer les épreuves du BAC, et sa copine était en première S. J’en profitai pour leur demander ce qu’ils pensaient des heures d’accompagnement personnalisé au lycée, la nouvelle « tarte à la crème pédagogique à la mode ». Ils me répondirent que c’était une perte de temps, que l’on n’avait rien appris pendant ces heures, et qu’en mathématiques ils ne comprenaient pas pourquoi on perdait tant de temps à faire des activités longues et fastidieuses pour finalement arriver à un « tout petit bout de résultat » insignifiant. Ils rajoutèrent qu’ils préféraient beaucoup avoir une leçon claire sur le sujet que l’on devait connaître, en allant droit au but, au lieu de tourner autour du pot pendant des heures.

Ces élèves n’ont pas tort : à vouloir tout introduire par des activités avec ou sans ordinateur, on brouille le message jusqu’à le rendre incompréhensible. A sans cesse vouloir tuer le cours magistral et tout ce qui peut y ressembler, on dilue les connaissances dans un imbroglio inextricable sans fil directeur visible, ce qui doit finalement paniquer beaucoup d’élèves. Les mathématiques sont devenues encore plus difficiles que ce qu’elles étaient à force de vouloir les démocratiser, mais là, elles deviennent difficiles même pour les « bons élèves ». C’est affreux !

Quelle démarche scientifique veut-on donner à nos élèves ? La démarche expérimentale. On présente les mathématiques comme s’il s’agissait d’une science expérimentale où il y a une nécessité absolue de confronter la théorie avec l’expérience, d’où cette utilisation effrénée de tableurs, grapheurs et de logiciels de programmation pour valider ou non une hypothèse et en tirer des conséquences. L’idée de théories mathématiques développées à partir d’une axiomatique et utilisant des raisonnements logiques a disparu de notre enseignement, et nos nouveaux professeurs certifiés de mathématiques sont aussi maintenant choisis suivant de nouveaux critères qui privilégient une vision expérimentale de cette discipline.

On pourra bientôt dire que l’axiomatique a été découverte au vingtième siècle, et enterrée au vingt et unième siècle. L’essence et la particularité de la science mathématique seront dorénavant réservées à une élite, alors que beaucoup d’élèves du lycée possèdent les moyens de les comprendre. Pourront-ils attendre ? Comment réagiront-ils ? Auront-ils envie de faire les mathématiques qu’on leur propose ? S’orienteront-ils vers d’autres voies après le BAC ?

Toujours au sujet des nouveaux programmes : 

« L'effet des propositions soumises à la consultation, au-delà de l'incantation de quelques prétentions inaccessibles, sera surtout de réduire encore les contenus de mathématiques délivrés aux élèves. L'introduction de sujets nouveaux comme l'algorithmique ne peut se faire sans que l'équilibre global des horaires des différentes disciplines soit revu. Les horaires consacrés aux sciences sont aujourd'hui très insuffisants dans la voie scientifique du lycée. Il est également très regrettable que les mathématiques aient disparu de certaines séries littéraires qui restent pourvoyeuses de cadres de l'état ou d'enseignants généralistes. » (Communiqué/AS)

L’enseignement des mathématiques est en péril, et l’Académie des sciences nous avait bien avertis. 

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Robert Gibbons, docteur ès manipulation scientifique

Dans un post récent sur le blog Mad in America, le journaliste d’investigation Bob Whitaker dénonce les tentatives de manipulation du chercheur Robert Gibbons, qui n’hésite pas à nous faire prendre les vessies pour des lanternes afin de faire la promotion des produits vendus par les laboratoires qui le financent. Quoique le sujet n’a pas un grand intérêt en France, il illustre les méthodes lamentables des sbires de l’industrie pharmaceutique.

Qui est Bob Gibbons ?

Selon son CV, Robert Gibbons dirige le centre pour les statistiques scientifiques de l’université de Chicago. En recherche pharmaceutique, les statistiques scientifiques servent à éliminer l’anecdotique pour déterminer l’effet global et général du médicament. Par exemple, si on commence à prendre un traitement qui provoque comme effet secondaire de voir des wookies au réveil, mais qu’on est la seule patiente sur 100000 à confondre son mari avec une grosse bête poilue (encore que…) cela ne sera pas considéré comme un effet secondaire propre au médicament, mais un phénomène rare résultant d’une interaction entre le médicament et le patient.

 Revenons à notre gibbon. Il a d’abord travaillé à l’université de l’Illinois (basée à Chicago), avant de venir à l’université de Chicago (c’est un peu comme en France, avec les diverses universités parisienne) où son travail a été récompensé de divers prix. Ses recherches ont été régulièrement financées par le NIH, qui n’a pas vocation à enrichir les escrocs, même s’il en est souvent victime.

 En somme, quelqu’un de neutre et très compétent. A moins que…

Des conflits d’intérêts qui surgissent

 En 2004, la Food and Drug Administration (FDA) établit que les antidépresseurs appelés inhibiteurs sélectifs de recapture de la sérotonine (ou ISRS, tels que Paxil, Seroplex, Prozac…), provoquent des envies de suicide chez les enfants, les adolescents et les jeunes adultes (le patient a 2 fois plus envie de se suicider). L’agence oblige alors les fabricants à écrire dans un encadré noir (Black Box warning, indiquant une dangerosité maximale) sur l’étiquette et la boîte un avertissement du type « attention, ne pas prescrire à un enfant, même suicidaire, ça pourrait lui donner (encore plus) envie de se suicider ». Gibbons fait alors partie du panel d’experts de la FDA chargé de prendre cette décision… et s’y oppose. En vain, puisque l’avertissement est adopté par 15 voix contre 8.

 Depuis, il ne cesse de publier des articles dans la presse scientifique pour dire qu’il n’y a pas de lien entre ces médicaments et le risque de suicide. Dans les plus récents, il reconnait qu’il sert d’expert à Pfizer (fabricant du Zoloft) et Wyeth (fabricant de l’Effexor, un cousin des ISRS) dans le cadre de procès intentés par des victimes des effets suicidogènes de ces médicaments.

Manipuler les données

 Dans l’un des premiers articles en question, Early Evidence on the Effects of Regulators’ Suicidality Warnings on SSRI Prescriptions and Suicide in Children and Adolescents, paru dans The American Journal of Psychiatry en 2007, Gibbons et ses collègues prétendent que l’avertissement sur les risques de suicide a fait diminuer les prescriptions de ces produits, alors que les taux de suicide chez les jeunes augmentaient dans le même temps. Sa conclusion : en incitant les médecins à prescrire d’autres produits (concurrents), l’avertissement provoque indirectement plus de suicides (puisque ces produits sont moins bons).

 Or, les critiques dénoncent que Gibbons a comparé ce qui n’était pas comparable : il dit que les prescriptions d’ISRS ont diminué de 22% entre 2003 et 2005, tandis que les cas de suicide ont augmenté de 14% de 2003 à 2004. On constate tous le biais : le chercheur aurait dû prendre dans les deux cas la même période. Mais il ne l’a pas fait. Et pour cause : c’est sur la période 2004-2005 que les prescriptions ont diminué, période pour laquelle Gibbons n’avait pas les chiffres de suicide. Et lorsque ceux-ci ont été connus, on a découvert qu’ils avaient baissé en même temps que les prescriptions d’ISRS. Gibbons a donc manipulé les données pour présenter un résultat CONTRAIRE à la réalité. Comme le dit Whitaker, ce n’est pas le genre de gaffe qu’on commet accidentellement, mais une pure manipulation.

 Au Pays-Bas (l’étude portait sur les statistiques néerlandaises d’une part, américaines d’autre part), la communauté scientifique critique de même vertement Gibbons, dénonçant des conclusions fausses et trompeuses, et son inconséquence. Même l’un des chercheurs qui avait écrit l’article avec Gibbons, Ron Herings, reconnait l’erreur et charge son collègue. En revanche, les médias américains prennent les conclusions pour argent comptant. Interrogé par le Chicago Tribune, Gibbons appelle à retirer l’avertissement « Black Box ».

Derniers articles

 Les deux articles les plus réents ont été publiés en début d’année dans Archives of General Psychiatry. Gibbons y reprend les anciennes études portant sur le Prozac et l’Effexor, et passe les chiffres à la moulinette des outils statistiques qu’il a mis au point. Dans le premier, intitulé Suicidal Thoughts and Behavior With Antidepressant Treatment, il conclue qu’il n’y a pas de hausse du risque de suicide. Dans le second, il réaffirme que les deux produits sont efficaces pour traiter la dépression chez les jeunes patients. De nouveau, il éveille l’attention des media américains (là et là) qui lui accordent une tribune pour déclarer que l’avertissement été abusif.

 Le docteur David Healy, l’un des principaux lanceurs d’alertes sur les ISRS, qui avait notamment dénoncé le manque d’efficacité de ces produits dans une étude retentissante, critique sur son blog les biais et incohérence des nouveaux articles de Gibbons :

· La population sélectionnée pour les études ne se limitait pas aux seuls jeunes patients (pourtant ceux concernés par l’avertissement).

· Il prétend que la seule baisse du score de l’élément 3 (pensées suicidaires) sur l’échelle de dépression de Hamilton (baisse donc uniquement observée sur une population globale) justifie qu’on néglige tout autre effet, aussi fatal puisse-t’il être, sans en nommer aucun (alors qu’on pourrai citer les risques cardiaques par exemple).

· Il utilise un langage qui est très éloigné de celui des statisticiens.

· L’étude d’origine sur le Prozac avait déjà été lourdement critiquée pour l’utilisation de modèles statistiques inadéquats et faussés.

· Après une première période de traitement, les individus répondant au placébo ou développant des effets secondaires au traitement ont été écartés des statistiques, précédé qui permet de faire ressortir une plus grande efficacité tout en masquant la dangerosité.

De même, le bloggeur Mickey Nardo, ancien psychanalyste qui tire régulièrement à boulets rouges sur Gibbons, dénonce que celui-ci a sélectionné certaines études et délaissé d’autres, qu’il a commis de lourdes erreurs de calcul, qu’il use d’une méthodologie opaque, qu’il présente des résultats de façon partiale, trompeuse et biaisée.

 Enfin, Matthew Miller de l’école de santé publique de Harvard, a tenté de reproduire les résultats revendiqués par Gibbons, et arrive à la conclusion inverse, qui justifie le maintien de l’avertissement sur les risques de suicide.

 Toutes ces critiques ont été envoyées à Archives of General Psychiatry qui les a simplement publiés dans son courrier des lecteurs. En conséquence, lorsqu’un médecin fera une recherche bibliographique sur les ISRS et le risque de suicide, il trouvera les études bidons de Gibbons, mais rien sur les critiques qui ont été émises à leur sujet.

Conclusions

 Voila donc des années que le comportement ouvertement manipulateur de Gibbons est dénoncé par ses pairs. Pourtant, rien ne change.

 Gibbons a le soutien de la presse généraliste, qui ne comprend de toute façon rien aux sciences médicale, mathématique ou statistique, et se pique de temps en temps de sauter sur un sujet racoleur, en l’occurrence critiquer la FDA.

 Il a également le soutien passif d’une certaine presse scientifique, qui lui est acquise, et qui préfère étouffer les critiques d’une manière assez habile pour qu’elle ne semble pas les censurer, les publiant là où personne ne les lira.

 La manipulation scientifique et les ISRS ont de beaux jours devant eux.

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